Comme je descendais des Fleuves impassibles,
Je ne me sentis plus guidé par les haleurs :
Des Peaux-Rouges criards les avaient pris pour cibles,
Les ayant cloués nus aux poteaux de couleurs.
J’étais insoucieux de tous les équipages,
Porteur de blés flamands ou de cotons anglais.
Quand avec mes haleurs ont fini ces tapages,
Les Fleuves m’ont laissé descendre où je voulais.
Dans les clapotements furieux des marées,
Moi, l’autre hiver, plus sourd que les cerveaux d’enfants,
Je courus ! Et les Péninsules démarrées
N’ont pas subi tohu-bohus plus triomphants.
La tempête a béni mes éveils maritimes.
Plus léger qu’un bouchon j’ai dansé sur les flots
Qu’on appelle rouleurs éternels de victimes,
Dix nuits, sans regretter l’oeil niais des falots !
Plus douce qu’aux enfants la chair des pommes sûres,
L’eau verte pénétra ma coque de sapin
Et des taches de vins bleus et des vomissures
Me lava, dispersant gouvernail et grappin.
Et dès lors, je me suis baigné dans le Poème
De la Mer, infusé d’astres, et lactescent...
Mais lire aussi d'Arthur Rimbaud : Le Buffet, La Bohème, Larme, La Maline
Découvrez les dessous de Vous n'en avez pas fini avec le bonheur.
De rencontres surprenantes en anecdotes amusantes ou étonnantes, revivez l'écriture de mon dernier roman.
Un étrange lien avec l'au-delà (1/1)
Nous sommes tous migrants.
Pape François, 16 avril 2016, île de Lesbos
Il faut pousser le portail rouge-sang ébloui de soleil pour disparaître sous le grand décor de cinéma qu'est la façade de la basilique Santa Maria. Alors que je souris béatement sous les grandes voûtes gothiques qui embaument l'encens et les siècles obscurs, une prosélyte m’aborde. Elle évoque la grandeur de Dieu et la miséricorde des corps. Je lui rappelle que sous les majestueuses croisées d'ogives, sous le maître-autel élevant ses dorures, gisent les ruines d'une mosquée. Elle me lorgne étrangement, se demandant si je place ce détail de l'Histoire à l'avantage de la papauté. Elle en tire la conséquence hâtive que oui, et sort de sa poche un tract en forme de marque-page avec la tête d'un jeune prêtre dont je comprends qu'il cessât de sourire bien trop tôt. Je compatis à la terreur rouge, rejetant clairement la violence aveugle des Républicains. Néanmoins, j'étais venu à Alicante, vous vous en doutez, pour étudier, la tragédie du port et la disparition de milliers de républicains sous les coups de phalangistes faussement déguisés en croisés de la foi.
Revenu de ma compassion, j'évoquai donc ces Républicains fusillés dans les arènes et dans les douves du port. Il se passa alors une chose inouïe. En même temps qu'elle levait la tête vers moi, ses yeux s'assombrirent, ses lèvres se tordirent et son bras s'arma d'une main tendue. Une fraction de seconde, guère plus, mais tout de même ! Puis, dans un effort de maîtrise de soi que trahissait sa voix soudainement dure comme de la pierre, elle me demanda de me taire. Redoutant qu'aucune force ne suffise à élever ma piété, la bigote tourna ses talons et s'éloigna vers une âme moins retors.
Fort de cette expérience et comprenant que, malgré la Commission civique pour la récupération de la mémoire historique en Alicante, de nombreux fidèles résistaient dans le déni de la tragédie du port, j'invitai une amie dont je connaissais la ferveur spirituelle afin de comprendre le mécanisme de la foi. J'avais toujours été intriguée par cette jeune femme de formation scientifique et enseignante dans le public, qui possédait les clés de l'église paroissiale et ne manquait pas de s'y agenouiller pendant, et même en dehors, des offices. Je ne fus pas déçu de notre entretien. Elle ne m'éclaira pas vraiment sur l'attitude des grenouilles de bénitier, mais m'expliqua comment elle, jeune fille, avait eu un jour... une vision ! Et, depuis comment depuis lors, elle entretient un lien avec l'au-delà... Se pouvait-il donc que les millions d'adhérents aux Jeunesses catholiques fussent également élus aux visions ?
Curieux d'en apprendre plus sur ce virus prophétique, je me mis à fréquenter Radio Catholique de France. Cette radio émet sur l'ensemble du territoire, même dans les collines perdues de Provence. Je la mémorisai à côté de Radio Zinzine, une radio locale furieusement anarchiste. Je prenais, et continue à prendre, un malin plaisir à zapper de l'une à l'autre. RCF ne répondit pas mieux à ma question : Comment devient-on croyant ? - mais elle m'ouvrit les yeux sur la partie lumineuse de la foi. J'appris à son écoute que la charité chrétienne n'est pas un vain mot. Et parfois mes parents, foncièrement athées, m'entendent citer Radio Catholique en tordant la bouche, assombrissant les yeux et il me semblerait presque apercevoir une main tendue.
Cette nouvelle approche de la religion m'aida à élucider un mystère. Celui du pape ! Pas le pape François. Non. Le pape de la République coopérative, Charles Gide en personne, dont je découvris interloqué son appartenance à la petite bourgeoisie... chrétienne ! Au point de vivre les trente dernières années de sa vie en solitaire, refusant de laisser prononcer son divorce pour des raisons divines. Et comment je ne vis pas plus tôt cette conjugaison quand le père du socialisme utopique se nommait Saint-Simon ou encore que le meilleur spécialiste du monde coopératif du XX° siècle, Henri Desroches, était dominicain avant d'être défroqué ! Enfin, je pensais trouver refuge dans la plus grande coopérative au monde pour abriter mon orgueil laïque... mais le consortium de coopératives devait tout au... père Arizmendiarietta !
Notes de Toni, Décembre 2018, Bibliothécaire anarchiste au CIRA de Marseille
Voici donc quelques notes trop brèves que j'ai écrites sur "Vous n'en avez pas fini avec le bonheur", comme je le fais habituellement pour les livres qui me paraissent intéressants, et ce fut le cas du tien.
"A travers un personnage qui rêve de créer une coopérative nous traversons la guerre d'Espagne, la Retirada, la IV° république, le mouvement hippie, les communautés cévenoles. C'est cette traversée mouvementée de l'histoire d'un humble idéaliste que le narrateur principal a transmis au soir de sa vie dans des cahiers enveloppés dans un drapeau rouge, à son neveu né en France. C'est ce texte que l'auteur déroule très habilement en faisant intervenir le neveu, lecteur de ces cahiers, ce qui a un peu compliqué ma lecture, surtout que dans le texte de l'oncle lui-même apparaissent des prises de paroles d'autres acteurs. A cette difficulté s'en est ajoutée une autre pour moi qui ne connaît pas la géographie de l'Espagne, le repérage géographique des moments, rendu encore plus difficile par un foisonnement de personnages. C'est d'ailleurs un des grands intérêts de ce livre de vouloir embrasser une époque qui fut si riches d'individus et de faits. Le romanesque se mêle à l'Histoire jusqu'à la révélation finale, vraie coup de théâtre, quand Carlos est retrouvé par sa fille dont il ignorait l'existence, devenue directrice d'une importante coopérative basque (production, distribution, banque, sécurité sociale...). Toute la période de la Guerre d'Espagne est exploitée à fonds, les idéaux, la peur et l'héroïsme, mais aussi l'amour, la recherche du bonheur dans la tempête, et le sacrifice de soi (la militante révolutionnaire qui accouche en prison et se suicide "en s'arrachant les veines"), sans pathos, sans sentimentalité. Les dialogues sont tous crédibles. Les mouvements de foules sont bien rendus (l'attente des bateaux sauveurs dans le port d'Alicante, ...).
Impossible de résumer ce livre foisonnant où se mêlent en un même récit divers destins, dispersés à travers l’Espagne franquiste et post-franquiste, le midi de la France entre 45 et le début du XXI° siècle. Mais on se laisse emporter, quitte à être parfois un peu perdu entre autres parce que l'auteur utilise fréquemment l'ellipse pour aboutir avec succès à une écrite nerveuse, avec quelques diversions heureuse par la poésie (description des marais, le corps des filles...) et surtout avec une volonté qui sous-tend tout le récit : présenter cette utopie réaliste que sont les coopératives. L'auteur a le souci de présenter les divers acteurs sous un jour favorable : communistes, anarchistes, et même sur la fin un prêtre. Seuls les franquistes échappent à sa bienveillance. J'ai dévoré avec grand plaisir ces 300 p. [...]
Voilà brut de décoffrages mes notes, telles qu'elles figurent dans mon cahier de lecture.
Le livre est archivé au CIRA sous la côte : Af4294.
Toni
Exemple de feuille de correction (huitième et dernière correction avec Cassy et Alizée) de Vous n'en avez pas fini avec le Bonheur
(pages 257 à 294 - Août 2018)
Le film par où tout commence (1/1)
Il ne manque pas dans l'actualité et dans l'Histoire, ni de dictateurs, ni de peuples opprimés. Mais le hasard m'a conduit à visionner Aurore, initiant, contre toute logique, le départ de cette aventure romanesque sur les routes défoncées de l'Espagne républicaine.
Peut-être les événements qui précédèrent furent-ils toutefois les réels déclencheurs de toute cette histoire. Il me faudrait donc remonter à cette journée du sept janvier deux mille quinze. J'avais passé la journée courbé sur mes dossiers, sans sortir du bureau, ni croiser personne comme étrangement oublié de ce monde hyperconnecté. A 18h00, démarrant mon véhicule, je fus surpris d'entendre les commentateurs radio se couper la parole, tour à tour accablés ou courroucés, excédés ou dépités, évoquant qui une attaque de la démocratie, qui une atteinte contre la liberté de la presse, avant qu'un flash spécial synthétise en deux phrases l'attaque contre Charlie Hebdo. A 18h05, en tant que président de la médiathèque communale, je pris la décision d'organiser une conférence sur la liberté d'expression. A 18h30, le maire m'accordait une salle et confirmait sa présence. A 19h00, Loro Mazono un ami journaliste burkinabé victime de la répression à Ouagadougou m'annonçait son indisponibilité. René Fregni, romancier de talent et éloquent apôtre des libertés endossait sa mission. A 19h30, un jeune dessinateur caricaturiste m'assurait son soutien. A 20H00, une journaliste de Var Matin accordait la couverture et le proviseur du collège voisin d'apporter son témoignage.
Et je passais les deux jours suivants à récupérer le DVD d'Aurore.
Deux jours plus tard donc, avec un orgueil parfaitement déplacé et une angoisse vrombissante, j'apprêtais les intervenants dans une petite salle de La Ruche. Dans cette ancienne cave coopérative aménagée en salle communale, une centaine de personnes avaient pris place. Un exploit pour un événement culturel au village ; sauf si on accepte le caractère culturellement provisoire du loto dominical ! La conférence précipita enthousiasme, débats et unité... jusqu'à Aurore.
Le réalisateur présenta son film sous l'angle, pourtant digne d'intérêt. Comment un dictateur bride son peuple par le silence ? Pour du silence, nous fûmes servis ! L'ampli prêté par un ami bassiste déforma la bande son en un magma à peine audible. Or, les trois quarts du film relevaient de dialogues en Espagnol, pour la plupart déjà à peine compréhensibles par les hispanophones. Dans ces conditions, le film-documentaire que je découvrais avec les autres, rebuta les plus téméraires, et les résistants firent preuve d'une courtoisie dont je reste encore confondue.
Pourtant, le lendemain, alors que quatre millions de manifestants pacifiques défilaient le poing levé dans les rues de l'hexagone, le film creusait en moi, insidieusement, une plaie qui s'ouvrait et me happait. Aurore les avait quittés, lui, le vieux communiste qui levait la tête vers les nuages, et son petit-fils. Et tous les deux cherchaient ce qui avait animé le corps d'Aurore, son sourire en l'avenir.
Et vous, êtes-vous solidaire de Charlie ? interrogeait la journaliste. Elle avait dû interviewer un millier de passants avant d'obtenir cette réponse :
- Faudrait voir !
Il faudrait voir ! Mais voir quoi ? L'avanie de cette réponse me fit piler au feu vert. Je sentis à peine les vibrations de la berline qui embrassait mon coffre. “Faudrait voir”, me revenait comme un couteau. Et avec lui ce nom : Carlos. Dans le rétroviseur, je vis à peine le chauffeur hirsute aux épaules carrées, lever les bras au ciel et ouvrir sa portière. L'aventure venait de commencer.
Bientôt la suite du OFF (Un étrange lien avec l'au-delà : 1/1)
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Trou de mémoire (3/3)
En deux nuits, j'avais validé mes thèses et précisé le scénario. [... 2/3]
Sauf que je m'aperçus bien vite de l'existence d'un deuxième tome. La magie se reproduisit. Tino monta sur l'escabeau décrépi, s'enfonça dans les combles et dégota le deuxième opus. Il m'invita à boire un café. Un café sans goût mais le meilleur que je n'ai jamais bu tant le charme de ce moment fut intense. Tino est un conteur de talent. Deux cents années d'histoires poussiéreuses le portaient, s'amplifiaient en lui et il me semblait les revivre à travers ses yeux d'enfant. Il narra l'apogée et la décadence de l'anarchisme. Pour lui, la coopération se mêlait à l'anarchisme, se fondait dans le combat des petits hommes en donnant aux sans-pouvoir le cadre et la capacité de s'autogérer...
Soudain le présent vint se rappeler à nous par l'irruption d'un jeune homme aussi gras qu'une pointe de flèche. Il nous expliqua en ahanan comment les flics venaient d'incarcérer trois des leurs. Il n'évoqua pas le sort des deux premiers, visiblement indéfendables. Pour le troisième, il précisa que leur ami revenait innocemment d'un concours de pétanque et qu'il se retrouva, par le plus grand des hasards, au cœur de la manifestation, avec trois boules de pétanque et la coupe du finaliste, une coupe en fer, étrangement biseautée, avaient précisé les flics.
Tino me prit à témoin en hochant la tête, Tu vois ?! Oui, je voyais. Je serrai la main de mon ami et me pressai de rentrer. En bas de la rue, je croisai une voiture de police tout gyrophare allumé. En allumant la radio, j'appris que des « éléments anarcho-syndicalistes » envenimaient les manifestations contre la loi « El Khomri » et que la police était sur les dents... J'avoue : j'évitai pendant quelques semaines de fréquenter le CIRA.
J'y retournai plusieurs fois par la suite car j'y fis envoyer des copies de manuscrits depuis le Centre anarchiste de Lausanne. Des témoignages dont l'écriture penchée et tremblante me ferait bientôt revivre le sort des migrants sur le port d'Alicante. Attendant Tino, je furetais dans les étagères, me rendant compte comment la guerre d'Espagne avait été le sommet du mouvement anarchiste. Tout y passait. Je laissais glisser mes doigts sur les tranches des ouvrages lorsqu'un gamin entra tout à trac et, m'ignorant, entama avec Tino - qui passa sa tête échevelée derrière une rangée de livres - un échange sur les migrants clandestins réfugiés dans la vallée de la Roya. Le gamin répétait le nom d'un homme qui les hébergeait et qui, visiblement, participait de la mouvance anarchiste. Je compris alors. Ce que j'avais pris pour l'ombre d'un mouvement endormi n'était que l'humble part de ses hommes, plus enclins à s'occuper des autres que de leur propre vie. J'ouvris la porte et regagnai la lumière aveuglante de la Canebière. Des odeurs d'huile, de poissons et de bonheur remontaient du Vieux Port.
Bientôt la suite du OFF (Le film par où tout commence : 1/1)
Lancement de Vous n'en avez pas fini avec le Bonheur à la cave coopérative historique de Maraussan
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Trou de mémoire (2/3)
Abandonnée sur une île déserte, cette femme aurait fait jaillir une cité. [... 1/3]
Elle leva la tête de son écran. De sa voix tendre comme une amande verte, me dit s'appeler Sandrine et manda mon numéro de portable. Ce n'était pas vraiment ce que j'attendais... mais pour une fois qu'on me le demandait ! Si cette femme - qui devant moi avait bâti une cathédrale de réseaux - n'avait pu obtenir le sésame, qui d'autre ? Je déjeunai d'un sandwich insipide sous un ciel éclatant d'un bleu à pleurer.
J'étais dans cet état neurasthénique quand, vers quinze heures, le téléphone sonna :
- Monsieur Houles ? Il est à Lausanne.
Je reconnus l'amande verte.
- A Lausanne ?
- En Suisse.
- En Suisse ?
Je manque cruellement de réparties devant les bâtisseuses de cathédrales.
- Au Centre de recherche anarchiste.
- Un centre anarchiste ? En Suisse ?
Vous admettrez l'incongruité de cet équipage. Un centre anarchiste helvétique ! Deux jours de voitures, l'autoroute, les péages, un hôtel dispendieux, froufrou et paillettes dans le sanctuaire des banquiers. Tout ça pour un obscur mémoire.
- ...
- Sinon, il y a une annexe...
Bruits de cliquetis...
- ... Il y a une annexe du Centre anarchiste à... Attendez, je vérifie. Oui. A Marseille.
A Marseille ! Je l'aurais embrassée. Voilà comment, une semaine plus tard, je remontai la Canebière et m'enfonçai dans une venelle aux murs griffonnés, moins impressionné par l'obscurité de la rue que par la rencontre avec mon premier anarchiste. Un homme tout en tendons m’accueillit en souriant au fond d'une bibliothèque bardée d'ouvrages jaunis, sentant l'histoire du monde et la poussière de la création. L'histoire anarchiste attendait ici, tapie dans ce trou de mémoire, pour se transformer en légende. L'homme à la barbe grise descendit ses tendons d'un escabeau décrépi permettant d'atteindre les hauteurs de la passion libertaire. Habillé comme un réfugié, ces cheveux blancs coiffés en vagues déferlantes lui donnaient un air de Rimbaud. Ses yeux n'avaient pas d'âge. Ils brillaient comme ceux des enfants et toute sa vie rentrait par leurs fenêtres. Il avait dû faire le coup de poing dans sa jeunesse, son nez en avait conservé la courbe. Mais, malgré lui, il représentait, je m'en aperçus par la suite, le grand-père exemplaire.
Il était les sept nains réunis et le prince charmant.
En désignant les combles où s'entassaient des cartons, il cria :
- Vous savez. J'ai retourné toute la bibliothèque...
Tino parlait fort. Ses oreilles avaient dû se fatiguer dans les manifs, coincées entre la pierre et le bouclier. Il me tendit un cahier à la peau rouge.
- Et je l'ai trouvé ! clama-t-il.
En effet, il était là, déjà dans mes mains. Je palpai la couverture cartonnée rouge en priant Bakounine et tous ses saints. Je pleurai devant la dédicace à Eusebio de la CNT AIT. Je n'étudiais plus l'Histoire, je la vivais.
Tino ne me contraint pas d'adhérer à sa bibliothèque pour emprunter le livre, pas plus à une quelconque confédération anarchiste ou autre structure, ni même de donner mon nom. D'homme à homme, les yeux dans les yeux. Juste mon sourire de petit paysan. Belle leçon d'humanité. Je descendis vers le Vieux Port, serrant la couverture cartonnée rouge contre moi.
En deux nuits, j'avais validé mes thèses et précisé le scénario.
Sauf que je m'aperçus bien vite de l'existence d'un deuxième tome...
Bientôt la suite du OFF (Trou de mémoire : 3/3)
Parce que la littérature c'est aussi le 9° art...
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Trou de mémoire (1/3)
Je m'étais déjà coltiné Enrique Cerdan Tato, son livre sur ma jambe droite et le dictionnaire Français-Espagnol sur la cuisse gauche. J'en étais sorti épuisé. Je fournis toutefois un dernier effort en consultant la bibliographie. Bien m'en a pris car un ouvrage attira mon attention : Les derniers jours de la République à Alicante.
Après quelques recherches sur la toile, je mandai l'Université de Nantes qui, de numéro en numéro, me conduisit à la porte du centre d'études hispaniques. Lequel était clos pour travaux ou je ne sais quelle raison et m'envoya donc visiter celui qui me semblait le mieux à même de répondre à ma quête, le réalisateur d'Aurore. Me rappelant à notre mémorable projection (Prochaine étape du OFF), il me confia n'avoir jamais eu accès à ce travail universitaire. Plus curieux que dépité, je relançai mes recherches par l'intermédiaire d'une amie avocate et écrivaine. Féministe reconvertie dans la littérature, elle espère toujours que son premier roman lui permettra de s'évader des barreaux de velours rouge. Bien qu'enseignante en Droit à la faculté d'Aix en Provence, elle ne joua pas plus que moi de réussite dans la quête des Derniers jours de la République à Alicante. La tragédie du port, je la vivais moi-même à la poursuite de ce mémoire et c'est ainsi que j'arrimai ma bouée à la bibliothèque Schuman.
J'avais bien entendu déjà arpenté la BU et écumé les rayons sur l'Histoire de l'Espagne et je crus ma délivrance enfin advenue avec cette bibliothécaire aux yeux verts, tendrement verts, une voix d'amande douce à se rouler dedans. Elle cliqueta, puis ouvrit des boites de fer gris remplies de fiches jaunies, partit dans la réserve, revint dépitée, cliqueta à nouveau, repartit, contacta une amie, cliqueta, contacta je ne sais qui, le président d'université, le recteur d'académie ou le ministre de la culture ! Elle cliqueta encore. J'en étais convaincu, abandonnée sur une île déserte, cette femme aurait fait jaillir une cité...
Bientôt la suite du OFF (Trou de mémoire : 2/3)
Suite à une Balade Vigneronne en Littérature animée par votre serviteur au mois de Mai, la journaliste Romy Ducoulombier, s'est attelée à un reportage sur le développement du modèle coopératif. Notamment sur la transition écologique et qualitative des caves coopératives de Provence.
Vous trouverez ci-dessous la première page du reportage paru dans le Figaro Magazine le 27 juillet 2018.